BOUILLONS CHEZ SIMONE

RÉSIDENCE ARTISTIQUE à CHATEAUVillain

Simone, résidence artistique chateauvillain

UNE RÉSIDENCE ARTISTIQUE EN DEUX TEMPS

Cette année, nous avons été invitées par le tiers-lieu Simone à Chateauvillain,  pour une résidence artistique autour de la sociabilité féminine en campagne. La résidence s’est déroulé en deux temps, une première fois au début du printemps en avril  puis une seconde fois au mois de juin.

Nous sommes arrivées au printemps où les champs sont remplis de fleurs de pissenlit. Nous avons rencontré les femmes phares de Simone, qui gravitent autour et font vivre le tiers-lieu. Nous avons observé, analysé les fleurs, les plantes et les matières, pour comprendre mieux l’environnement dans lequel nous arrivions. Nous sommes allées dans les chemins de traverses récolter les plantes tinctoriales et comestibles, et dans la belle ferme d’Emy aussi. Nous avons dessiné, organisé des moments d’apéro et participé au club tricot, où Anna notre stagiaire à ce moment là a appris à tricoter un super début de pull. Nous avons récupéré des outils du quotidien et agricoles du village pour transformer des matières en expérimentations et en objets.

Residence artistique chez Simone

residence artistique chez Simone
residence artistique chez Simone
residence artistique chez Simone ChateauVillain
Bouillons chez Simone

Nous sommes venues avec nos techniques artisanales, et les personnes qui sont venues chez Simone ont aussi amené leurs histoires et leurs savoirs-faire. Nous avons commencé à expérimenter la vannerie, le tricot, les encres végétales. Transmettre la fabrication de papier, la teinture du tissu avec des plantes, le tissage…

Dans ces flux d’échanges chacun.e y a trouvé un chemin qui lui plaît. Emy organisera des ateliers de fabrication de papier après notre départ. On imagine plein de possibles et on fait des choix pour continuer à faire des pièces pour la seconde partie de la résidence. Nous repensons encore au moment où tout le monde a tapé du marteau sur le même tissu, c’était fort. C’est pour ça que nous continuons à faire des ateliers  où nous transmettons et où nous apprenons en même temps, parce que cela rend possible d’autres formes du faire, ça prépare d’autres personnes à créer en cohérence avec le vivant et en plus ça tisse du lien entre nous et ça nous rend plus fort.e.s.

residence artistique chez Simone atelier papier

SIMONE, QU’EST CE QUE C’EST ?

« Labellisée « Fabrique de Territoire » en 2020, SIMONE rassemble depuis 2015 des habitants et des artistes dans l’esprit d’un Tiers-Lieu autour de trois champs d’action : le champ artistique & culturel, les services aux habitants et l’expérimentation économique et sociale. 

Elle est installée dans les anciennes usines des bottes Le Chameau, à Châteauvillain, en milieu rural (52), et accueille des résidences d’artistes, des ateliers de pratique et des stages ou se mêlent amateurs et professionnels, tout en proposant des services de proximité aux habitants (paniers bio, marché de producteurs locaux, vide-dressing, point relais lalibrairie.com, café associatif, espace de coworking…). »

Extrait du site internet de Simone

 

residence artistique chez Simone teinture

DE RETOUR SOUS LE SOLEIL

Après une semaine de résidence à Simone, en avril, nous y sommes retournées pour dix jours en juin. Nous étions heureuses de retrouver toutes ces personnes qui vivent le lieu et le font vivre, toutes ces femmes pleine d’énergie, tous ces soleils qui gravitent dans cette galaxie créative.

La toute première fois que nous avions eu contact avec le tiers-lieu Simone, il avait été question que notre projet de résidence se porte sur la sociabilité féminine en milieu rural. Cela nous avait beaucoup plu comme sujet ! Et pourtant, nous avions l’impression de nous en être complètement écarté lors de notre venue en avril….
En revenant à Simone en juin, nous nous sommes rendues compte que c’était bien ça : nous retrouvions des femmes, nous revenions dans un réseau fort de sororité et de création, au milieu de la campagne haute-marnaise.

Depuis un moment nous chérissons le texte d’Ursula Le Guin, « La théorie de la fiction-panier » (1986). Dans ce texte, elle met à l’honneur l’histoire-vivante à la place de l’histoire-qui-tue, elle renvoie le concept de Héros en bas de son piédestal avec sa lance et sa chasse aux mammouths, et elle nous parle de l’histoire qu’on ne raconte pas, l’histoire qui soigne, l’histoire qui nourrit, l’histoire avec un petit h, l’histoire de tous les jours, l’histoire de la récolte et du panier.

residence artistique chez Simone
residence artistique chez Simone

« LA THÉORIE DE LA FICTION PANIER »

« Je n’ai jamais pensé que j’avais, ou même que je voulais une part de tout ça, tant que l’on expliquait l’origine et le développement de la culture à travers l’invention et l’usage d’objets longs et durs, destinés à pénétrer, frapper et tuer.
(…)
Allez-y, dis-je, tandis que je m’aventurai à travers l’avoine sauvage, avec Oo Oo en écharpe et la petite Oom dans le panier sur mon dos. Continuez à raconter comment le mammouth est tombé sur Boob, comment Cain est tombé sur Abel, comment la bombe est tombée sur Nagasaki, comment la gelée ardente est tombée sur les villageois, comment les missiles vont tomber sur l’Empire du Mal et toutes les autres étapes de l’Ascension de l’Homme.
Si c’est faire quelque chose d’humain que de mettre une chose que vous voulez dans un sac, parce que cette chose est utile, comestible ou belle, de la placer dans un panier, dans de l’écorce ou dans une feuille enroulée, dans un filet tissé avec vos propres cheveux, ou dans tout ce que vous voulez, et ensuite de ramener à la maison cette chose-là, dans une maison qui n’est qu’une autre sorte de grande poche ou de grand sac, un contenant pour les gens, et que plus tard vous ressortez cette chose pour la manger, la partager, la conserver pour l’hiver dans un récipient plus solide, la mettre dans le sac-médecine, sur l’autel ou dans le musée, à l’endroit vénéré, dans l’espace qui contient ce qui est sacré, et que le lendemain vous faites plus ou moins la même chose – si faire cela est humain, si c’est cela qu’il en coûte, alors je suis un être humain après tout. Pleinement, librement, joyeusement, pour la première fois. »

URSULA LE GUIN

Walpurgis, une résidence artistique

Avec les plantes récoltées dans le merveilleux jardin de Emy, et les draps de la brocante de Jeannot, nous nous sommes replongées dans la teinture végétale locale. Et avec l’inspiration que nous donnait ce lieu vivant et la voix de Ursula Le Guin qui continuait de nous parler, nous avons dessiné des figures de l’histoire-vivante. Des figures qui pourraient représenter le soin, la récolte, le partage, la transmission, et la création.

Nous avons exposé ces pièces textile à la Forge (des Ateliers du milieu), au milieu d’autres pièces dont on vous parlera plus tard… Et nous avons proposé une promenade contée avec la lecture de quelques passages de La théorie de la fiction-panier.
Nous vous invitons à lire l’extrait en commentaire, et si voux le désirez à retrouver le texte entier sur le site Terrestres.org.

Walpurgis, une résidence artistique

residence artistique chez Simone
teinture naturelle Simone
Residence artistique

Walpurgis, une résidence artistique

Nous sommes revenues chez Simone avec nos pains de terre pour fabriquer un petit four sur le modèle japonais des minigamas. Un être magique, imaginaire dont les formes se dessinent au fur et à mesure de sa construction et des contraintes du feu. Un four-ventre dans lequel s’opère la métamorphose de l’argile au contact des flammes. Un tout petit four que l’on peut prendre sous le bras et déposer au bord d’une rivière pour cuire quelques pots qui recueilleront et conserveront ensuite des nourritures.
 
Avec les habitant.e.s des alentours, nous avons modelé des petits pots dans de la marne provenant des sols environnants. Le soleil glissait le long des Briques de l’ancienne usine de bottes et les conversations s’étiraient avec le jour. En modelant l’argile, nos esprits se retrouvent massés et bienheureux. Ursula Minigama prenait aussi la lumière d’or et sa peau de terre séchait aux derniers rayons du soleil.

Une semaine après la fabrication d’Ursula Minigama, nous avons construit un grand feu de joie et veillé aux flammes dans lesquelles se métamorphosait notre four, sa nature d’argile devenant céramique (c’est-à-dire terre cuite).

Le lendemain, au petit matin, nous avons sorti Ursula Minigama de son lit de braises pour inaugurer sa première cuisson avec toutes ces merveilleuses personnes rencontrées lors de notre résidence chez Simone

Walpurgis, une résidence artistique